Chaque hôpital pourrait ainsi développer une chaire de philosophie consacrée à la formation et à la recherche. Chaque Faculté de médecine pourrait développer une Université des patients, permettant de diplômer des patients-experts et d’engager l’enseignement réciproque des acteurs de la santé ; chaque hôpital, enfin, pourrait confier aux patients le soin de diriger et d’organiser un service de soins.
Cynthia Fleury, professeur de philosophie et psychanalyste
Depuis janvier 2016, après avoir été créée inauguralement à l’Hôtel-Dieu (AP-HP, ENS), la chaire de Philosophie à l’hôpital est un dispositif hospitalo-académique qui se déploie dans différents lieux hospitaliers et de soin, aujourd’hui au sein du GHU-Paris, Psychiatrie et Neurosciences (Sainte-Anne, Maison Blanche, Perray-Vaucluse), et rattachée à la chaire Humanités et Santé du Conservatoire National des Arts et Métiers. Elle s’inscrit dans un programme de recherche, d’enseignement et d’expérimentation plus vaste encore, puisqu’il regroupe l’Université des patients (fondée et dirigée par le Pr. Catherine Tourette-Turgis, Sorbonne Université, hôpital La Pitié-Salpêtrière), les différents partenariats (cf. écosystème) et la mise en place des POC.
La chaire de Philosophie à l’hôpital et l’Université des patients fonctionnent en « creative commons », en mettant à disposition leurs travaux, pour mieux inventer la fonction soignante en partage et l’alliance efficiente des Humanités et de la santé. Chaque hôpital pourrait ainsi développer une chaire de philosophie (au sens générique du terme, relevant des sciences humaines et sociales) consacrée à la formation initiale et continue des acteurs de la santé, à la recherche. Chaque Faculté de médecine pourrait développer une Université des patients, permettant de diplômer des patients-experts et d’engager l’enseignement réciproque des acteurs de la santé ; chaque hôpital, enfin, pourrait confier aux patients le soin de diriger et d’organiser un service de soins spécifique, bénéficiant d’une gouvernance organisationnelle et des soins alternative.
Dans quel but, ces différentes innovations socio-thérapeutiques ? Celui de répondre aux enjeux toujours renouvelés d’inventer de nouveaux modèles de solidarité. S’ils sont pris au piège de la raréfaction des moyens, ils sont aussi rénovés par l’usage, alimentés par les nouvelles expertises des citoyens, des patients-experts, des industriels, des scientifiques, le tout dans un cadre de santé connectée.
L’hôpital est l’espace-temps de la singularité : la naissance, la maladie, l’accident, le suicide, la mort. Et pourtant aucune autre institution ne dit autant la chosification de l’être et de ce qu’il traverse comme épreuves. Il ne s’agit pas de stigmatiser le corps médical. Il s’agit simplement de faire de l’hôpital le lieu de vie et de réflexion, d’entraide et d’itinérance, qu’il est substantiellement. Il doit devenir un lieu ouvert, de réflexion et d’expérimentation, de circulation et d’échange des savoirs : un espace public citoyen et scientifique.