Co-responsable : Faroudja Hocini, psychiatre-psychanalyste, chercheure associée à la Chaire de Philosophie à l’Hôpital, doctorante en philosophie contemporaine à l’Université Paris Sorbonne.

Co-directeur : Bruno Dallaporta, médecin à la Fondation Santé des Étudiants de France, docteur en sciences, docteur en éthique et philosophie appliquée à la santé.

Conseil scientifique : Dominique Bourg et Cynthia Fleury.

Le séminaire aura lieu, en amphithéâtre Morel, à l’Hôpital Sainte-Anne, Paris 14, les mercredis de 19h à 21h30.

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Public : ouvert à toute personne intéressée qui souhaite s’engager de façon fidèle, sympathique et durable dans une recherche collective.

Séminaire uniquement en présentiel, sans enregistrement.

Ce séminaire de recherche « La riposte poétique / Une seule santé » s’inscrit dans le prolongement du séminaire sur l’imagination. Face aux multicrises (écologiques, institutionnelles, politiques, sanitaires, énergétiques…) que traversent nos sociétés, il s’agit aujourd’hui non pas d’être seulement déploratifs mais surtout de devenir imaginatifs. Il s’agit non pas de se contenter de la « réalité réaliste » et ses limitations des « possibles » (pour reprendre les termes travaillés ensemble) mais de se rendre sensibles à l’imagination « réelle » prête à accueillir « l’extravagance » et l’impossible. Il s’agit non pas seulement de « gérer les canalisations » mais de « rouvrir la source » de l’inventivité.

Cette année, notre recherche aura une double intention : d’une part, proposer une riposte poétique et, d’autre part, interroger les valeurs du soin, comme valeur de la démocratie mais aussi valeurs de l’écologie (car le soin que nous portons au corps malade, s’il est thématisé philosophiquement avec rigueur, a quelque chose à nous dire du soin qu’il faudrait porter au monde commun et à la Terre malades). C’est dans l’écart entre ces deux propositions que nous espérons qu’une imagination pourra se déployer.

Notre société semble au tournant d’un changement de paradigme civilisationnel, c’est-à-dire d’un changement de matrices de pensées et de valeurs. L’ancien monde de la modernité a montré sa destructivité toujours en action. Ses valeurs encore à l’œuvre sont fondées sur le mythe de l’autonomie pure, l’indépendance, la liberté de déliaison, la mise en objets du monde et des êtres, la concurrence, la logique marchande et la gestion des risques : tout ceci aboutissant à un nihilisme et une pulsion de mort.

Un monde nouveau cependant émerge, dans les interstices du tissu social, à travers des expérimentations de terrain, dans les savoirs expérientiels et les territoires. Ces valeurs préférentielles qui émergent sont celles de l’habitabilité commune et du soin de notre monde commun.

Les valeurs du soin sont caractérisées par une responsabilité vis-à-vis des vulnérabilités, de nouvelles sagesses d’habitation de la terre, une attention à la logique du don, à nos interdépendances et à nos co-appartenances passées, présentes et futures, ici et ailleurs. Ce monde neuf, souvent invisibilisé et dévalorisé, il nous faut le nommer. Le plus souvent, les personnes soignantes elles-mêmes ne réalisent pas qu’elles détiennent là un trésor philosophique. Il s’agira de le mettre en perspectives, d’en considérer les enjeux afin d’élargir ces valeurs du soin, au vivant et à notre monde commun.

Car nommer c’est aussi faire exister, c’est reconnaître et soutenir de nouveaux imaginaires bien « réels ». Par soignant, nous entendons toute personne qui prend soin, pas seulement dans l’univers médical, paramédical ou médicosocial, mais aussi tout « soigneur », qui veille ou éveille, enseigne, porte attention à nos « communs », soigne le vivant, répare les objets et s’engage pour le « prendre soin » qui constitue en soi une riposte poétique.

Car les valeurs du soin sont les valeurs de demain : il s’agit dès aujourd’hui de prendre soin non seulement de soi mais aussi des autres – humains et non humains, et de notre monde commun, proche et lointain, présent et à venir. Il s’agit bien d’une seule santé, d’une santé commune, dont nous partageons le même fond poétisable, mais aussi les horizons de vie et de sens. Elle nous enjoint à élargir nos sentiments d’habitabilité commune, mais aussi d’hospitalité réciproque des humains à la Terre, du prochain au lointain, du visage au paysage.

Pourquoi la riposte poétique ?

Le poétique n’est pas affaire de rimes ou d’ornements, le poétique est politique, éminemment.
Car les mots sculptent et influencent nos pensées et nos actes, il nous faut oser de nouveaux mots, de nouveaux imaginaires. Il nous faut oser l’acte neuf, dans l’imprévisibilité, le hasard, les chemins de traverses, l’extravagance de la sortie des normes stabilisées, des règles de la métrique et de la chronométrie, oser la pluralité des temps, des suspens, des rythmes, la pluralité des formes de vie et du vivant. La riposte poétique, c’est aussi l’accueil de l’étranger et de l’étrangeté, « envers et malgré tout », cet étranger dont nous ne voulons pas mais qu’il nous faut désirer néanmoins, néanmoins comme dirait Jaccottet (si par désir, on entend le risque de la vie, de l’inconnu et de la rencontre). Face à la menace de la continuation de l’ancien monde et sa destructivité, la riposte poétique est une chance pour nous que du nouveau survienne.

Soignant, soigné-e-s, soigneur-e-s,
Levons-nous, c’est l’heure !

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