DISPOSITIF DE PHILOSOPHIE PRATIQUE / ATELIER D’ÉCRITURE / RECUEIL DE TEXTES
Animé par Valérie Gateau, philosophe et formatrice en éthique
Ces dernières années, le burn-out est en constante augmentation dans les métiers soignants. Il a des conséquences sur la santé mentale et physique des personnes qu’il affecte (il peut conduire à la dépression voire au suicide). Il a aussi des conséquences pour la santé des patients (manque d’empathie, cynisme, risque d’erreur). La souffrance au travail a longtemps été tue – parce que considérée comme le fait d’une faiblesse personnelle – alors que de nombreuses recherches ont montré la part des organisations du travail dans cette souffrance. Avec la crise de la Covid-19, la part des facteurs organisationnels dans la souffrance des soignants est devenue manifeste.
Un soin soumis au codage informatique, à la performance et à des protocoles rigides peut miner la vocation des soignants, leurs valeurs, leur engagement. Il déstructure le temps du soin (qui est imposé par une logique extérieure aux besoins des patients et soignants). Il abîme le collectif (les temps de partages informels y sont du « temps perdu ») et peut conduire au burn-out des soignants, et au soin « dégradé » des patients. Pendant la crise, les soignants ont montré la force de leur engagement et de leur responsabilité. Ils n’ont pas hésité à dire combien les organisations du soin (manque de moyens, de personnel, gestion des « flux », statuts précaires) contribuent à leur souffrance. Leur parole doit être entendue, et la souffrance des soignants doit être pensée en lien avec les organisations de leur travail, pour élaborer un soin juste et bienveillant pour les patients comme pour les soignants.
C’est le but de ce dispositif de clinique philosophique du burn-out que de penser ces questions, au fil d’un séminaire qui articule pour chaque séance, un temps d’exposé et un temps d’écriture.
Ce dispositif vise à produire des connaissances avec les soignants, à partir de leur vécu. Il propose de renouer avec la pratique de la narration partagée, pour penser à nouveaux frais le sens du soin, sa temporalité, ainsi que les conditions de la reconnaissance des métiers et institutions de soins. Il aboutit à l’édition d’un recueil des textes produits et choisis par les participants.
Valérie Gateau est chercheuse associée à la Chaire de Philosophie à l’Hôpital depuis 2019, où elle travaille principalement sur le burn-out des soignants et son accompagnement par une philosophie clinique. Ses recherches actuelles portent sur les identités individuelles et collectives dans la perspective des éthiques narratives. Elle a publié un ouvrage (Pour une Philosophie du don d’organes, Paris, Vrin, 2017) et de nombreux articles sur les questions bioéthiques et sur la philosophie du soin.
Les séances sont dessinées par l’artiste Jacopo Mandich, qui participe aux séances depuis 2020. Ses sculptures et dessins questionnent notre identité au fil des paradoxes dans lesquels nous vivons, notamment le contraste entre nos forces vitales et notre fragilité dans un monde incertain et fragmenté.
Quand le récit fait soin : paroles et récits de soignants
Mercredi 15 juin a eu lieu la conférence-débat qui a clôturé l’atelier “une clinique philosophique du burn-out”. Après une introduction par Cynthia Fleury, suivie d’une présentation de l’atelier par Valérie Gateau, l’écrivaine Sarah Chiche intervenait puis échangeait avec la salle sur la question “l’écriture est-elle thérapeutique ?”. Cet événement se proposait de prolonger les questionnements et de rendre hommage aux récits des soignants exprimés pendant l’atelier, par une mise en scène de leurs textes, lus par des comédiens, et au fil d’une exposition des dessins de l’artiste Jacopo Mandich, issus de leurs productions.